La réforme des régimes de retraite initiée par le gouvernement a mis la France en révolte.
Je vois trois raisons essentielles au marasme social actuel, mais on pourrait en énumérer d’autres.
1) Le gouvernement, comme ses prédécesseurs, ne fait pas de politique mais de la gestion. Or, les Français ne sont pas les employés d’une entreprise “France” dont le gouvernement serait le conseil d’administration ; ils sont des citoyens et constituent ensemble une nation. Le gouvernement doit servir la France et chaque Français, et non se servir d’eux et de la France au profit d’actionnaires.
2) Nos politiciens-gestionnaires actuels méconnaissent totalement les sains principes du bon gouvernement. Je n’en rappellerai qu’un seul, qui est essentiel : la mission prioritaire de l’Etat est d’assumer ses fonctions “régaliennes”, que lui seul peut assumer ; pour les autres fonctions politiques, il doit “d’une part promouvoir l’autonomie de chaque échelon social dans le respect intégral du bien commun national, d’autre part aider ceux qui en ont momentanément besoin, enfin et seulement si nécessaire, suppléer à leur défaillance définitive ou momentanée.”[1]
3) En France, tous les rapports humains, notamment en politique, sont conçus comme des rapports de force, des “guerres” de classes, d’ego ou d’intérêt, mais des “guerres” de plus en plus dépourvues de “règles de la guerre”. Dans ce type de conflit, le but est de vaincre l’autre coûte que coûte et non de trouver, ensemble, le bien commun, la meilleure voie ou le moindre mal, en un débat constructif encadré par des règles claires et s’imposant à tous.[2]
Ce diagnostic étant posé, un gouvernement faisant de la politique en vue du bien commun et de celui de chaque Français aurait réformé les retraites à partir de 4 principes fondamentaux bien établis :
1) Tout Français, sans distinction, notamment de sexe ou de profession (ou d’absence de “profession” reconnue comme telle, par exemple pour les mères), a droit à une retraite ou une pension lui permettant au minimum de subvenir à ses besoins fondamentaux pendant ses “vieux jours”.
2) Il est un devoir pour tous ceux qui en ont les moyens de préparer leur retraite au cours de leur vie active, afin de peser le moins possible sur la société dans leur vieillesse, et de participer au paiement des retraites de ceux qui ont eu des moyens insuffisants pour cela.
3) Les caisses de retraite doivent être autant que possible sous la responsabilité d’associations professionnelles, familiales ou autres ; ces associations pourraient aussi voir leurs missions progressivement élargies, notamment à l’assurance d’un revenu minimum vital pour leurs membres.
4) Il revient à l’Etat de veiller à l’application de ces principes, c’est à dire de susciter, aider, coordonner, et de ne s’impliquer directement que lorsque les personnes ou les associations ne remplissent pas leurs missions, et dans le seul but de les aider à remplir elles-mêmes ces missions.
Mais cette démarche ne portera tous ses fruits potentiels que dans le cadre beaucoup plus large d’une politique de libération du travail, de restauration de l’amour du travail comme facteur d’épanouissement, de chasse aux gaspillages[3], de réduction des impôts et autres charges, etc. Elle peut alors ouvrir la voie à la création d’un revenu universel minimum. Enfin, il est aussi nécessaire de restaurer progressivement la responsabilité personnelle, notamment en réhabilitant le principe antique selon lequel “celui qui ne travaille pas s’il le peut… qu’il ne mange pas non plus!”
Il faut surtout que la nation, et particulièrement ses responsables politiques et ses élus, se décident à mettre fin à la culture du conflit permanent, à construire une nouvelle unité nationale, et plus encore à replacer l’homme et son épanouissement personnel dans ses communautés d’appartenance, notamment la famille, comme seule raison d’être de la politique.
En réalité, les réformes les plus importantes, et même vitales, à réaliser de manière urgente, sont là! J’ai fait de nombreuses propositions sur ce sujet et suis prêt à participer à leur mise en oeuvre.
Général Didier TAUZIN
[1]C’est le “principe de subsidiarité” ; voir “La Grande Charte de France”
[2]En 2013, le sénateur Michel, rapporteur de la loi Taubira, disait : “ce qui est juste, c’est ce que dit la loi. (Celle-ci résulte) d’un rapport de force à un moment donné.”
[3]En 2017, la Cour des Comptes estimait à 50000 le nombre de retraites versées indument.